OTRE Bretagne

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« MESSIEURS LES ANGLAIS, TIREZ LES PREMIERS ! »

Cette fois ci, ça y est ! L’échéance du 1er janvier 2021 a consacré le divorce de la Grande-Bretagne avec l’Union Européenne. Tristesse affichée chez les européistes convaincus même si le pire a été évité avec un accord commercial signé, au pied du sapin de Noël, entre Londres et Bruxelles permettant d’éviter des droits de douane ou des quotas par type de marchandises. Chez les souverainistes, plus ou moins acharnés, on pavoise. Comme le britannique Nigel FARAGE, le leader du parti europhobe UKIP, prônant l’indépendance » du Royaume-Uni depuis 2006. Il a réussi son coup ! En jouant sur la défiance des anglais envers l’Union, c’est lui qui poussa le Premier ministre d’alors, David Cameron, au référendum de 2013 sur le Brexit. Et en 2021, le même Nigel Farage prédit maintenant que le Brexit marque le commencement de la fin de l’Union européenne, selon la confidence faite à Michel Barnier, rappelée par ce dernier au journal de France-Culture ce 19 janvier…

Rétablir les frontières. Le Brexit inaugurerait-il le mouvement ? Un rêve sans utopie poursuivi par nombres de responsables politiques que d’aucuns qualifient encore de « souverainistes ». La fin de l’Europe, nous n’y sommes pas encore. Car gageons que l’application du Brexit pourra, peut être, en dissuader plus d’un d’accélérer le mouvement. Notamment dans le transport routier.

Déjà, maintenant, tout de suite, pour les professionnels transporteurs routiers, il reste le plus compliqué : le rétablissement de la frontière physique, donc des douanes, avec des contrôles qui ne manqueront pas de ralentir les flux de part et d’autre.

Comme le rappelle Les Échos du 30 décembre dernier, le commerce entre la Grande-Bretagne et le continent représente en valeur 56 milliards d’euros de flux dans les deux sens, acheminé par 4,4 à 5 millions de camions annuels, soit une moyenne de 16 000 poids lourds par jour. Et 70 % de ces échanges passent par les trois points clés des Hauts-de-France : les ports de Calais, Dunkerque et le terminal Eurotunnel de Coquelles. Le reste se réparti notamment par les ports normands de Dieppe, Le Havre, Caen et Cherbourg. Et de souligner que « Le moindre grain de sable peut donc provoquer une pagaille, comme l’a montré récemment l’obligation soudaine de tests anti-Covid pour les chauffeurs quittant l’Angleterre, face à la nouvelle souche du virus. »

Les entreprises de transport adeptes du Transmanche seront demain soumises à des formalités nouvelles à l’import, comme à l’export : des déclarations de sûreté/sécurité ainsi que des formalités sanitaires ou phytosanitaires, pour les produits d’origine animale ou les animaux vivants, par exemple. Ce qui inspire à Olivier THOUARD, directeur douane et représentation fiscale chez le transporteur Gefco la réflexion suivante : « Autant de vraies nouveautés, plus un principe qui n’est pas habituel du tout : faire les formalités de douane avant de passer la frontière.C’est maintenant plus simple de travailler avec la Russie ou l’Ukraine, avec juste une déclaration export… ».

Un processus qui a déjà entrainé depuis trois ans l’embauche et la formation de 270 nouveaux douaniers… Restent les conducteurs, venus de toute l’Europe qui devront se familiariser avec ces nouveaux systèmes. Une angoisse qui n’épargne pas les quelques 150 000 entreprises françaises commercent avec le Royaume-Uni, mais dont beaucoup de PME non habituées aux formalités douanières …

Les chargeurs et routiers devront se familiariser avec des nouvelles pratiques et surtout des tas de nouveaux sigles : comme le MRN, le code-barres de la déclaration en douane des marchandises, ou le TAD, code-barres de « l’enveloppe logistique » permettant de grouper plusieurs MRN. Il pourra être demandé au conducteur son ENS, déclaration sommaire d’entrée, à télétransmettre avant embarquement dans le ferry, ou encore le « Kent Access Permit », qui empêchera un camion d’entrer si les formalités ne sont pas faites en amont. De plus, toute entreprise voulant dédouaner des marchandises outre-Manche devra aussi disposer d’un EORI britannique (numéro d’enregistrement des opérateurs économiques) …

Pour l’heure, tout va bien… Les transporteurs estiment que tout se passe bien… Sauf que les britanniques ont prévu un scénario en deux temps pour l’arrivée des marchandises européennes sur leur sol, avec six mois de répit avant d’imposer des contrôles systématiques en juillet 2021…

Bref, curieux balancier de l’Histoire. Les pères fondateurs de l’Europe économique, s’étaient attaqués dès 1957, à tout ce qui pouvait entraver la fluidité des échanges commerciaux, au premier rang desquelles figuraient les formalités douanières ! Elles reviennent. Triomphantes, renforçant le pouvoir d’une forme de bureaucratie tatillonne fut elle digitalisée…

Rétablissement des frontières un progrès ? Une protection ? Une régression ? L’expérience le dira mais, sans doute au détriment des transporteurs.

Alors, le Brexit inaugure-t-il une nouvelle ère frontalière ? Nul ne sait !

En attendant, comme jadis l’armée de Louis XV les y invita, à la bataille de Fontenoy : « Messieurs les anglais, tirez les premiers ! »